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Le mariage selon la tradition dans Sous l'Orage (Exposé)

Posté par Termita, mise à jour le 25/07/2021 à 17:39:38

Introduction


D'une part, le poids du passé, l'autorité de la tradition, le prestige des anciens, d'autre part, l'appel de temps nouveaux, l'ouverture et les émois de la jeunesse : la profondeur millénaire de l'Afrique et les horizons stimulants dévoilés par d'autres formes de savoir, ce débat est celui des pères et des fils, et tel est l'orage subi par les peuples africains. Il est très remarquable en ce roman, si juste d'écriture, si mesuré de ton, de voir ce peuple - ici une famille et un village maliens - sortir de la tourmente sans sacrifices extrêmes : la parole sage a raison des passions, et le désordre de l'histoire finalement s'épuise face à l'ordre de la vie. Sous l’orage évoque des thèmes essentiels parmi lesquels « l’expression de la condition féminine » qui est le thème de notre exposé.

I. Biographie et bibliographie de l’auteur



1. L’auteur
Seydou Badian Kouyaté effectue des études de médecine à l’université de Montpellier en France1. Il est l'auteur d'une thèse sur les traitements africains de la fièvre jaune2 et fut un grand poète
En 1956, il rentre au Mali et est nommé médecin de circonscription. Proche du premier président Modibo Keïta, il écrit les paroles de l’hymne national du Mali. Il devient à l'indépendance du pays ministre de l'Économie rural et du Plan. Lors du remaniement du 17 septembre 1962, il devient ministre du Développement. Il défend l'existence d'un parti unique dans l'Afrique postcolonial, seul moyen selon lui de créer la Nation. Lors du coup d’État de Moussa Traoré en 1968, il est déporté à Kidal puis s’exile à Dakar au Sénégal.En 1997, il est candidat à l'Élection présidentielle mais décide, comme la plupart des autres candidats opposés au président sortant Alpha Oumar Konaré, de retirer sa candidature pour protester contre la mauvaise organisation des élections. Militant de la première heure de l’Union soudanaise-Rassemblement démocratique africain, il en est exclu en 1998 pour s’être opposé à une partie de la direction qui prônait la non-reconnaissance des institutions lors des élections contestées.

Écrivain reconnu internationalement, il publie en 1957, trois ans avant l’indépendance du Mali, son premier roman intitulé Sous l’orage. en 1965, il publie les dirigeants africains face à leurs peuples. Deux autres romans sont publiés ensuite, Le Sang des masques en 1976 et Noces sacrées en 1977.En octobre 2007, Seydou Badian Kouyaté publie un roman intitulé La Saison des pièges. En 2009 Seydou Badian Kouyaté change de nom et s'appelle officiellement Seydou Badian Noumboïna, du nom d'un village dans le cercle de Macina.

2. Ses Œuvres
1957 : Sous l’orage suivi de la mort de chaka
1965 : Les Dirigeants africains face à leurs peuples, Grand prix littéraire d'Afrique noire.
1976 : Le Sang des masques
1977 : Noces sacrées
2007 : La Saison des pièges, Nouvelles Éditions ivoiriennes et Présence africaine

II. Résumé de l’oeuvre



Sous l’orage met en scène deux jeunes Africains aux idées modernistes (Kany et Samou) dont l’amour réciproque est contrarié par les projets du père Benfa.

En fait d'orage, le livre nage dans les bouleversements sociaux et politiques que provoquent les injustices, le racisme, les inégalités de toutes sortes caractérisant le régime colonial. Vu sous cet angle, le roman est celui de la contestation du colonialisme parce qu'écrit à un moment où on déniait au Noir toute responsabilité du fait de la couleur de sa peau. Le conflit qui domine l'œuvre fait polémique puisque le conflit de génération (jeunes et vieux défendent leur conception du monde) côtoie le conflit de culture (la tradition s'oppose à l'école des Blancs). Mais le plus important est que l'œuvre reste d'une actualité brûlante sur des thèmes comme le mariage forcé, l'émancipation de la femme.

C'est l'histoire d'une écolière Kany que son père destinait au riche commerçant, polygame Famagan. Mais Kany aime un étudiant, Samou. Sa mère tente, en vain, de la convaincre de s'en tenir à la tradition. Le père décide alors d'un retour aux sources en envoyant Kany et son frère Sibiri au village chez leur oncle Birama. Celui-ci, paradoxalement, dénoue le dilemme imposé à tous les protagonistes notamment à Benfa ténu par "la parole donnée" si chère aux Africains.
D’après Seydou Badian Kouyaté ne milite cependant pas contre la tradition puisque Benfa constate qu'un séjour prolongé du tronc d'arbre dans la rivière n'en fera jamais un caïman et insiste sur le flux continu entre les générations : "des racines aux feuilles, la sève monte et ne s'arrête jamais". Pour l'auteur de "Noces sacrées", on peut évoluer sans se renier mais non sans souffrir puisque le père, déçu, avertira un de ses enfants : "Et toi aussi, mon fils, un jour tu auras soif".

III. Le mariage selon la tradition dans le roman



Avec son roman " Sous l’orage ", Seydou Badian évoque un thème qui a été largement traité, la place du mariage dans une société africaine où le droit coutumier est mis à mal par les nouveaux venus, les Blancs et leurs cultures. Les nouveaux maîtres imposent des obligations juridiques en porte-à-faux avec les traditions. Le mariage coutumier n’y échappe pas.

En Afrique, celui-ci ne consacre pas uniquement une alliance entre deux époux. Le mariage engage aussi et c’est un point essentiel, l’union de deux familles qui se doivent assistance dans une société régie par les solidarités communautaires. Cet acte crucial ne peut pas être délégué à la seule responsabilité de deux jeunes jouvenceaux irresponsables et cela au titre d’un mariage d’amour. Ce genre de comportement individualiste est inenvisageable. Ce serait le reniement des paroles des ancêtres. Une violation sacrée. Pourtant les nouvelles générations entendent secouer le joug des interdits pour répondre favorablement à leurs désirs. Confrontés à ses nouveaux défis, les anciens accusent les colons et leurs écoles. Des écoles qui égareraient les jeunes des sentiers traditionnels par le martèlement de l’individualisme. En dépit d’un sujet souvent traité par ses consorts, Seydou Badian réussit tout de même à apposer sa touche personnelle dans un style fluide qui rend agréable la lecture.

Ayant étudié le problème du mariage dans Sous l’orage, nous pouvons remarquer que: Le problème de l’éducation de la femme a existé à travers les âges ; le problème de l’autorité du père sur le mariage de ses enfants n’est pas d’origine africaine et ne date pas d’hier. Analysant le système du mariage en Afrique noire, Seydou Badian remarque que le pouvoir du père de décider le mariage de ses enfants existait autrefois en Europe, et peut-être existe-t-il toujours dans certains milieux ; et il écrit : « Nous ne saurions nous en étonner puisque nos lois supposaient, hier encore, le consentement des Parents au mariage ; puisque dans certains milieux l’usage demeure encore de mariages arrangés par Les parents. Cependant les pouvoirs réservés au père par les usages - sinon par les coutumes – en Afrique, étaient considérables ; puisqu’il arrivait qu’ils décident seuls du sort de leurs enfants en Particulier de leurs filles ».

Il convient de noter que selon la tradition en Afrique noire, il relève à la fois du droit et du devoir du père de bien marier son enfant. C’est un droit en ce sens que, par son autorité de chef de famille, le père a la prérogative de choisir un époux ou une épouse pour son enfant. En principe, le problème du choix ne se pose pas dans la mesure où l’enfant ne peut pas refuser le choix de son père sans s’aliéner la tradition et la société que représente l’autorité paternelle. Comme le dit bien Seydou Badian, on sait que « la tradition est transmise par l’autorité paternelle et la société ». Les raisons qui justifient le choix du père se trouvent dans le caractère communautaire du mariage en Afrique noire où le mariage traditionnel est avant tout une alliance entre deux familles avant d’être un contrat entre deux individus qui s’unissent. En l’occurrence, le père ne peut pas marier sa fille à un homme dont il ne connaît pas le statut Personnel, car il lui faut préserver l’honneur de son propre Famille. Il est donc normal qu’il cherche l’alliance d’une famille amie. Ainsi le père Benfa insiste-t-il que sa fille épouse Famagan, parce que ce dernier est bien connu dans la famille et tout le monde s’est renseigné sur lui. En outre, l’intérêt économique joue un rôle important dans le choix du père. Par exemple, le père Benfa a choisi Famagan comme époux pour sa fille, non seulement parce qu’il est bien connu de la famille, mais aussi à cause de ses richesses. Autrement dit, il peut payer la dot et aussi apporter une aide financière à ses futurs beaux-parents. Tout compte fait, nous constatons que dans Sous l’orage, le fond du problème c’est l’éducation de la femme, c’est-à-dire la formation européenne que reçoit Kany, la fille du père Benfa. Donc, le père s’oppose à Cette formation non pas en tant que telle, mais en tant que système qui détourne, l’enfant de la tradition et Privé le père de son autorité paternelle. Le système scolaire empêche le mariage précoce et par là, empêche-le père d’exercer sa prérogative dans le domaine du mariage de l’enfant, puisqu’il ne peut plus marier ce dernier comme et quand il le veut. D’où le conflit entre le père et l’enfant au sein de la famille. Dans ce conflit, nous remarquons que le père est furieux contre l’enfant désobéissant. A la fin du conflit, le père est indigné et apparaît comme un héros vaincu parce que toutes les corrections Paternelles se sont montrées inefficaces.
Pour sa part, l’enfant considère la formation européenne comme un moyen de se libérer du joug de la tradition et de l’autorité paternelle. L’enfant ayant Fréquenté l’école n’est plus prête à épouser n’importe qui, n’importe quand. Il a appris une idée Nouvelle de mariage c’est-à-dire un mariage d’amour et de choix personnel, et non plus un mariage Précoce et forcé.

Conclusion


Ainsi dans Sous l’orage, Kany préfère-t-elle mourir plutôt que d’épouser un Homme qu’elle n’aime Pas. Cette volonté inébranlable de l’enfant fait échouer les corrections paternelles et l’inefficacité de ces Mesures Punitives traduit l’affaiblissement de l’autorité du père. Ce dernier, voyant que la force ne Peut rien résoudre, se Résigne malgré lui et laisse l’enfant faire à sa guise. C’est-à-dire grâce à sa Formation européenne, celui-ci peut Désormais agir indépendamment de l’autorité paternelle au sujet De son propre mariage. C’est ce que Seydou Badian nous laisse Entendre dans Sous l’orage, et nous croyons que l’imagination romanesque ne contredit pas la Réalité africaine



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